La suspension des seuils sociaux pendant 3 ans :
« Delirium Rebsamen Tremens ? »

 
 

Dans un cauchemar profond, un pauvre ministre, fraîchement nommé au ministère du travail, ressassait sans cesse cette lourde réalité : il serait désormais le ministre comptable du chômage, chômage qui irait augmentant, quoiqu’il fasse…

C’est dans le cadre de ses nuits agitées par ce drame que toutes les idées,même les plus fantasques, lui passaient alors par la tête :car il n’était pas forcément compétent en la matière et stressé comme il l’était en l’occurrence, on ne saurait lui en vouloir :

Les nuits agitées et les noirs cauchemars de l’impuissance produisent en effet fantasmes et rêveries insolites et absurdes, c’est humain !

Seulement alors qu’au petit matin chaque être humain, doué de raison , débarbouille de son aspect  fantasmagorique les idées émanant de ses nuits agitées, et les remise aux oubliettes, voici que chez ledit ministre, la rêverie obsédante et confuse persistât bel et bien…

 

Ne nous permettant pas de formuler d’hypothèse concernant le sujet  rêvant et fantasmant, contentons nous donc de révéler l’absurde contradiction dans laquelle ce fantasme nous plongerait, s’il se trouvait qu’il devienne réalité.

 

Côté salariés, l’hypothèse de suspension durant 3 années des seuils (50 salariés) pour les CE et les CHSCT, ça donnerait quoi en réalité ?

 

Un droit applicable pour les entreprises qui ont cinquante salariés après la publication du décret, et un autre droit applicable pour les malheureuses entreprises, qui, ayant déjà dépassé ce seuil, n’en bénéficieraient pas : que serait alors devenue l’égalité que suppose le droit en matière d’application identique pour tous ?

Quelle serait alors la lisibilité d’un droit qui serait révocable au bout de trois ans ?

Quelles seraient les prévisions que pourrait faire un salarié embauché au titre de ce décret , au bout de trois ans ? Qu’il sera alors licencié pour « ne pas dépasser les seuils établis uniquement pour 3 ans ? »

 

Ceci introduirait une insécurité juridique ingérable et particulièrement peu propice à un développement stable pour les rapports sociaux, ainsi plongés dans la noire incertitude d’un potentiel décret ultérieur dont personne ne saura à l’avance s’il sera publié ou non.

Ce décret viendrait, ou ne viendrait pas, après trois ans pour confirmer ou infirmer les seuils de cinquante salariés, ou en proposer d’autres ?

 

Et ce décret ultérieur serait ou ne serait pas selon une hypothèse macro économique (cette mesure créerait de l’emploi ?) qui, quoiqu’il en soit, demeurerait invérifiable en l’état (parce qu’on ne saura jamais, si cette mesure créait de l’emploi, dans quelle mesure elle en créé ou si ce n’est pas un autre facteur qui en serait l’origine, comme la reprise mondiale par exemple ?)

 

Pire encore, que nous dit une telle mesure de suspension des seuils? Exactement l’inverse de ce qu’énonce pourtant notamment la loi du 14/06/2013 sur la sécurisation de l’emploi : que les instances représentatives sont utiles et nécessaires à la sécurisation juridique de l’emploi, mais aussi au renforcement du dialogue social et à l’implication économique pour aider à instituer une réelle démocratie sociale, facteur de productivité pour l’entreprise, parce que facteur de concertation entre tous les partenaires sociaux.

Autrement dit, ce que nous signifierait en filigrane cette suspension des seuils pendant trois ans, c’est que ce sont les IRP qui  nuisent à « l’emploi sécurisé», démentant du même coup toutes les bases jetées par les récentes lois (et aussi celle du 5/03/2014 sur la formation professionnelle) qui sous tendent l’hypothèse exactement inverse : les IRP sont une aide à l’institution d’une économie saine de l’entreprise sur la base d’un dialogue social approfondi.

 

Par ailleurs et concernant les CHSCT, voilà qu’à l’heure où , de fait, l’immense enjeu des risques psychosociaux les implique, on prendrait une mesure visant à les éliminer des entreprises de  plus de cinquante salariés, alors qu’il serait au contraire urgent et nécessaire d’étudier comment les entreprises de moins de cinquante salariés peuvent aussi bénéficier de l’appui indispensable (pour les salariés) de cette instance CHSCT qui doit se développer , et dans ses moyens et dans sa généralité, quelque soit le seuil de l’effectif salarié ?

 

Mais bien sûr, on pourrait penser que ce type de mesure de suspension des seuils ,à priori extrêmement défavorable et  confusante pour les salariés, serait favorable aux employeurs : un sou de réflexion démontre pourtant tout le contraire :

 

Comment penser qu’un employeur va se lancer dans une embauche massive au-delà de cinquante salariés parce qu’il n’aurait alors pas de CE ni de CHSCT, alors même qu’il ne lui serait pas garanti que la mesure sera pérenne ? Au contraire c’est un frein à l’embauche massive que de changer sans cesse les règles du jeu ,ou pire encore, de menacer de les changer sans cesse.

 

Quant à l’employeur qui a déjà décidé de franchir ce seuil de 50 salariés, parce qu’il a besoin de plus de salariés, ce qui lui serait offert là est ce qu’on appelle un effet d’aubaine, et n’est donc nullement nécessaire pour créer de l’emploi. !

 

Monsieur Rebsamen, cette mesure que vous projetez, issue de vos compréhensibles cauchemars de ministre responsable du chômage, produit un effet cumulatif rare : en effet, une telle mesure serait à la fois :

 

- anxiogène pour tous, salariés et employeurs, générant une insécurité juridique considérable

 

- probablement inefficace en matière d’emploi et si elle devait être un peu efficace, ce serait à la marge, confusément et pour un temps très court et de plus, on ne pourra jamais le mesurer vraiment.

 

- contradictoire avec le message passé par les lois précédentes et signal d’une gouvernance particulièrement  chaotique.

 

- clivant pendant trois ans, entre entreprise bénéficiant de la mesure et celle qui n’en bénéficie pas (droit morcelé et donc affaibli).

 

- décourageante pour les IRP, qui se battent chaque jour pour que leur compétence soit entendue, car c’est leur signifier « qu’ils sont des gêneurs »et non pas les partenaires indispensables d’une démocratie sociale améliorée  et efficace pour la compétitivité et la productivité.

 

Monsieur Rebsamen, prenez un temps pour vous, quelque vacance peut être, et revenez avec les idées claires,on vous pardonnera ces errements facilement, notamment s’ils sont appelés à ne faire partie que de mauvaises rêveries ,et à ne surtout pas se traduire en une quelconque réalité..
 


 
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OCTOBRE 2014
 



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