Vers une segmentation du courtage ?


 
 
Touché par le contexte économique difficile et une réglementation toujours plus dense, le courtage dans son ensemble cherche un nouveau souffle. Entre un marché du grand courtage toujours plus concurrentiel et de petits acteurs indispensables mais fragiles, les grossistes tirent leur épingle du jeu. Tour d’horizon d’une profession qui, par la force des choses, semble se segmenter peu à peu.
 
Même si la crise pèse encore sur le marché du courtage, la profession en tant que telle reste solide, malgré les idées reçues. Pour preuve, le nombre de courtiers en assurance inscrits à l’Orias (Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance) ne faiblit pas. “Sur la période 2012/2013, nous ne constatons pas d’érosion du nombre de courtiers. Les fortes augmentations des années précédentes s’expliquent plus par une mise en conformité que par un développement économique pour certains acteurs”, précise Grégoire Dupont, son secrétaire général.



 
“Ce chiffre est tout de même à prendre avec des pincettes puisqu’il n’y a pas “un” mais “des” courtages en assurance. Entre un courtier qui ne fait que de l’assurance-vie et un Marsh par exemple, ce n’est pas forcément le même métier. Il y a vraiment des réalité économiques différentes autour de ce vocable”, précise M. Dupont.
 
Aujourd’hui, ce n’est donc pas le nombre de professionnels qui pose problème, mais plutôt leur positionnement sur un segment complexe. Si les grands courtiers traversent la crise sans heurts, ils se livrent pourtant une guerre sans merci sur un marché où les clients sont de plus en plus regardants sur la concurrence et où les assureurs tirent les prix vers la bas. Deux tendances qu’il faut contrer pour les spécialistes des grands risques.
 
“Il y a aujourd’hui un marché des courtiers tendu car il y a beaucoup de compétition, mais il y a en parallèle un marché de la souscription avec les assureurs qui lui n’est pas tendu”, lance Hervé Houdard, directeur général de Siaci Saint-Honoré. “Nous sommes dans un marché où il y a toujours de la matière à traiter avec des clients à assurer. Par contre, la concurrence est très dure et certains acteurs préfèrent vendre à perte plutôt que ne rien vendre. Cela crée des conditions de compétition très difficiles. Il y a un certain nombre d’affaires où le prix trop bas ne nous permet pas une rémunération suffisante”, explique de son côté Robert Leblanc, PDG d’Aon France.
 
Au travers de ce marché qui déborde de capacités, la compétition entre les courtiers sur les activités commerciales perturbe finalement le business des acteurs du Top10. “Nous sommes sur un marché difficile où la matière assurable ne continue pas à se développer naturellement”, explique Franck Allard, PDG du courtier Filhet-Allard. “Il faut aller la chercher ou il faut reprendre des affaires à la concurrence. Cela fait baisser les prix, nous passons notre temps à rattraper le retard et nous ne pouvons plus nous développer tout en perdant évidemment sur nos marges”.
Quelle place reste-t-il pour le courtage de proximité ?
 
Face aux géants du secteur, les “petits” courtiers et les acteurs de proximité arrivent-ils à survivre ? Entres modestes cabinets de province et enseignes familiales ouvertes depuis plusieurs générations, le problème est tout autre, même si les enjeux sont finalement similaires.
 
“Nous avons les même problèmes que tout le monde car au final il y a moins d’argent qui circule. Nous enregistrons évidemment une majoration des primes de la part des compagnies d’assurance sur les risques aux particuliers, notamment en auto, mais surtout en MRH”, explique Miche Pinet, vice-président du courtage de proximité à la CSCA (Chambre syndicale des courtiers d’assurance).
 
Si les professionnels dits “de proximité” semblent indispensables – notamment en matière de conseil – la clientèle est aujourd’hui beaucoup plus exigeante et pousse les courtiers à se spécialiser d’avantage. “En ce qui concerne le marché du courtage, se met en place petit à petit une segmentation des clientèles. Toute le monde ne pourra pas continuer à faire de tout”, précise Franck Allard. “Aujourd’hui, les entreprises sont demandeuses de valeur ajoutée dans le conseil et sur tout un tas de risques et de problématiques. Un homme seul dans son cabinet n’a pas la capacité d’être omniscient, et forcément une certaine clientèle se porte petit-à-petit vers des structures plus importantes avec la certitude d’obtenir des réponses adaptées. Tout cela veut dire que les portefeuilles continuent à bouger et je pense que l’évolution du courtage tend vers une segmentation avec des clients adaptés à la taille du cabinet”.
Courtiers grossistes, la relève ?
 
Face aux difficultés rencontrées par les petits acteurs du courtage, les courtiers grossistes se révèlent être une alternative efficace, notamment face au manque de guichets. “Comme les discussions sont plus difficiles avec les clients et que certains assureurs réduisent leur nombre de courtiers, les petits et moyens acteurs se tournent vers les grossistes”, note Michel Pinet.
 
“Nous, courtiers grossistes avons un rôle à jouer pour simplifier le process de distribution pour ces courtier de proximité, peut-être aller au-delà, de les aider à se mettre en conformité sur les problèmes de règlementation (ndlr – notamment l’ANI, la loi Alur ou la loi Hamon) et les conseiller”, explique Laurent Ouazana, directeur général de Ciprés-Vie et secrétaire général du Syndicat 10.
 
“Il y a aujourd’hui une vraie place pour ceux qui sont réactifs. Il ne faut pas entretenir la sinistrose ! Certes notre métier est plus contraignant et de plus en plus réglementé, mais quand la prestation est à la hauteur de l’attente du client, on arrive très bien à sortir son épingle du jeu”, précise Sylvie Langlois, directrice générale de Solly Azar.
 
Si les problématiques des grossistes ne sont pas exactement les mêmes que le reste du marché, rien ne semble arrêter les principaux acteurs de ce créneau où de récents acteurs, comme Santiane, apportent de nouvelles perspective de développement, notamment via Internet.

 
Par Thierry Gouby News Assurances pro le 2 Juin 2014.
 
 



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